jeudi 6 novembre 2014

RopeFest 2014, Saint-Pétersbourg

Comme toujours quand il est question de partir en Russie, il est question de visa.
Et même si nous étions particulièrement douées à cet exercice depuis le voyage à Moscou, nous ne pouvions pas anticiper les caprices des horaires d'avions qui allaient se révéler particulièrement changeant.
Quand le voyage initialement réservé prévoyait une nuit à Varsovie et une entrée en Russie le samedi, nous avons du compiler avec un nouveau voyage sans nuit de transit à Varsovie mais avec une entrée en Russie le vendredi.
Si les choses se sont plutôt bien passées pour moi, Mila, elle a dû refaire son visa une deuxième fois avec les bonnes dates, sous peine de rester coincée en zone internationale tout le vendredi.
Mais cette mésaventure aura été la seule du voyage, une fois, les visas en poche, aucune douane, aucun douaniers ne nous aura plus jamais ennuyées.

Jeudi 6 novembre.
Elle arrive en début de soirée de Limoges. Un petit tour rapide, un peu de causerie sur les dernières nouvelles à se donner et hop au dodo.

Vendredi 7 novembre.
Départ sur les chapeaux de roues, pour être vers 5 h du matin à l'aéroport.
Trajet sans événement majeur, arriver à l'aéroport, trouver le guichet pour les valises, peser les valises et constater que la plus lourde dépasse les 20kg, se poser des questions sur un éventuel excédent de bagage et finalement voir que la limite est de 23 kg et qu'il reste environ 1 kg de marge.

Attendre l'embarquement avec le wifi de l'aéroport (free wifi #mot-clé), embarquer dans le petit avion de LOT, y somnoler entre 2 passages des hôtesses, arriver à Varsovie, prendre les cartes d'embarquement, fumer dans le minuscule fumoir aquarium de l'aéroport, embarquer dans le 2° avion, arriver à Saint-Pétersbourg, passer la douane sans souci, récupérer les valises, sortir de la zone internationale et trouver une jeune fille accrochée à une feuille de papier sur laquelle est inscrit : "METRESA".
Saluer la charmante Chloé qui sera notre hôte pendant le séjour, sortir attendre notre chauffeur du jour qui nous ramènera chez Chloé en nous laissant passer par une banque faire notre change au préalable, avoir une Chloé adorable qui nous sert de traducteur et gagner un temps fou dans la moindre opération.
Enfin, nous voilà déposées dans un immense quartier dont une partie est encore en construction, faite d'immeubles de plus de 20 étages.
L'ascenseur nous dépose au 19° étage avec des travaux d'aménagement des communs encore en cours et dont nous pourrons suivre l'évolution tout le long de notre séjour (mise en place du carrelage et montage d'un mur).
L'appartement de Chloé est coquet et spacieux, elle nous donne de suite nos serviettes, nous présente notre lit, nous propose des boissons chaudes et un repas.
Pendant que le repas réchauffe, nous faisons connaissance avec ses deux chats dont un chat de race sphynx absolument adorable.
Une petite douche, on se prépare et nous voilà reparties d'autant que Chloé a une prestation ce soir, puisqu'il est question de soirée fetish, nous sommes vêtues pour l'occasion.
Ce que nous ignorons c'est que, avant la soirée fetish, il faut prendre le métro, attendre la fin de la soirée d'ouverture du festival et manger au restaurant, le tout en tenue fetish donc.

Premier trajet dans le métro russe, gigantesque à l'image du pays, certaines stations comportent des lustres si grands que chez nous on les mettrait à Versailles pas dans le métro.
La présence de l'ordre, partout aussi avec des hommes en uniforme qui vérifient que l'on a bien nos jetons de métro à l'entrée de chaque station.
Nous descendons à une station en centre-ville et remontons un immense escalator tandis qu'une suite infinie d'uniformes défile en descendant de l'autre côté : scène surréaliste.
Chloé semble perdue en sortant du métro et hésite un peu, il fait froid et il pleut.
Elle retrouve finalement son chemin et nous arrivons à la salle, le Phoenix Club.

Une salle située au 3° étage d'un immeuble de bureau, les derniers spectacles du vendredi se tiennent. Nous n'en voyons rien ou si peu, il y a énormément de monde à saluer, à retrouver.
Chloé nous présente le "My Master" dont elle nous parle depuis notre arrivée, nous découvrons une frêle jeune femme, moi qui m'attendait à fort et viril homme dans la force de l'âge.
Ayant retrouvé tout le monde, il se décide d'aller manger dans un restaurant georgien proche dans un bel ensemble. Notre délégation remplit le restaurant et les occupe à tout-va entre les différentes commandes et nos prises de photos.
Étrangement, nous trouverons à échanger en français avec un attacheur allemand dont c'est la première langue et qu'il maîtrise avec brio sinon l'essentiel des conversations se font en russe ou en anglais. C'est un plaisir de revoir tout le monde et là encore, le temps file à grand vitesse.
La nuit se continue sur la soirée fetish et les choses se compliquent.
Nous sommes fatiguées, les 2 heures de décalage ne jouent pas en notre faveur après s'être levées à 2 h du matin et après le voyage. Mais Chloé ne cesse d'être sur scène et nos espoirs de repos s'éloignent.
Nous rentrerons assez tard et très fatiguées.

Samedi 8 novembre
La journée commence tard avec de la neige qui tombe. Elle ne cessera pas de la journée.

La seule priorité du jour est le show à 21h40 et l'ambition d'être à la salle vers 18 h. 
Mila nous commande des pizzas pour le repas. Chloé nous explique qu'elle attend des amis, nous nous préparons très doucement avec des coupures pour fumer sur le balcon ou pour prendre des boissons chaudes.
Les amis de Chloé arrivent, nous sommes déjà prêtes, ils discutent beaucoup et ne semblent pas prêts à partir, je passe sur le balcon et découvre S. avec une bouteille en plastique coupablement trouée à sa base par une brûlure de cigarette. Une fraternité de Dreadlocks se noue entre lui et moi, nous essayons de communiquer entre son absence d'anglais et mon ignorance du russe. Il partage sa douille à la russe avec moi, je lui montre ma propre méthode, grand moment de fraternité de Ganja fans.
Vient l'heure de partir, nous comprenons que S. et son amie vont nous emmener en voiture.
La circulation dans Saint-Pétersbourg semble aussi compliquée que dans Moscou, le GPS nous fait faire 100 détours et nous arrête à la mauvaise adresse.
De fait, Chloé n'arrivera à la salle que 20 min avant son propre show !
Pendant ce temps, nous sommes bien occupées de notre côté, la clé usb de Mila n'est pas reconnue par aucune des machines de la salle, nous sommes à 1 heure du show et nous n'avons pas de son.
C'est le moment que choisit Karol pour demander un jeu de cordes à Mila.
J'arrive à joindre Fab via FB avec un clavier en cyrillique et il nous met le son à disposition en ligne, le régisseur transfert le fichier et me lance un sourire.
Mila veut retourner fumer une dernière fois, mais c'est déjà l'heure du show précédent le notre, je pense à me changer d'abord et à essayer de m'échauffer un peu quand même.
Nous sommes fin prêtes, même si Mila avait hésité à se changer plus tard pour ne pas dévoiler sa tenue en allant installer ses points de suspension.
Le stress monte, les minutes semblent des heures, applaudissement pour la fin de l'autre show, j'ai la sensation de n'avoir pas pu m'échauffer correctement, je me mets dans un coin des loges, devinant l'afflux de la fin de show.
Les gens vont et viennent dans tous les sens, il y a des affaires partout, je perdrais mon briquet dans la bataille.
Je m'entête à échauffer mon dos dans le chaos, Mila part gérer les points de suspension, Chloé vient me dire "good luck", tout le monde fait des compliments sur ma tenue, ça me fait plaisir et je réponds consciencieusement que c'est Mila qu'il l'a choisie.
Elle revient, elle sourit mais le stress est palpable, elle me prend la main.

C'est maintenant.
Je tends tout mon être vers elle, elle me redonne quelques consignes que je connais déjà sur la façon dont elle aime que l'on salue.
Nous avançons sur scène, les flashs, la foule, elle me place sous un anneau, pas le même que d'habitude mais je ne relève pas. Elle me touche et commence à passer les cordes, quelque part au loin il y a une musique que je connais, mais Elle devient le centre du monde.
Les cordes glissent mal sur le tissu de la nuisette, je la sens s'agacer et s'énerver, j'essaye de bouger du 1/2 millimètre qui suffirait à lui faire la différence, je me doutais que le tissu allait la gêner mais quand elle l'a choisi, elle pensait à moi, à me voir belle dedans, pas à elle et à ses cordes...
Elle termine le TK et m'accroche au point de suspension inverse des autres fois, c'est inhabituel mais cela ne me semble pas avoir d'autres conséquences.
Elle continue ses passages de cordes en essayant de rattraper le temps qu'elle pense avoir perdu mais je suis positionnée sur un tapis et sur un mouvement brusque, je perds l'équilibre et glisse.
Elle me récupère et termine de me suspendre.
Et là, commence une sorte de tourbillon un peu fou où se mêlent et s'emmêlent les sensations des cordes et de ses jeux, je ne sais plus bien où j'en suis, ni où elle est. Elle semble être partout à la fois, pincement, morsure, baiser, chaud, froid, dix milles sensations m'envahissent qui bousculent mes sens et me basculent. J'ai la sensation que le monde n'a jamais été rien d'autre que cette avalanche de sensations qu'elle déverse sur moi. Insaisissable et omni-potente, elle m'emmène dans les cordes sans seulement en avoir conscience.
A un moment, la mémoire du corps prend le pas sur l'ivresse de l'esprit et je comprends qu'elle me ramène à terre, la musique qui me parvient est inhabituelle. Il me faut une fraction de seconde pour comprendre si c'est leur bande-son parce que nous avons dépassé la nôtre ou si c'est bien la nôtre.
Je comprends qu'elle a 2 chansons d'avance, au bas mot 6 minutes. Je sens qu'elle s'apprête à me redescendre quand je sens aussi combien les cordes se coincent l'une après l'autre, sans cesse.
Je saurais par la suite qu'en plus des cordes qui réagissaient mal au climat humide de Saint-Pétersbourg, son chapeau et sa cape la gênaient, sans parler des fausses dents qui étaient un énorme handicap pour se caler la corde dans les dents, comme elle le faisait pour cette figure.
Elle arrive à décoincer les cordes, les faire glisser correctement et entreprend de me détacher.
Au moment où elle m'agenouille, je sens qu'elle glisse quelque chose entre mes pieds et je me doute que ce sont mes fausses dents.
Elle termine de me détacher et jette sa cape sur moi comme convenu mais elle me murmure :
"je ne trouve plus les dents, mets-toi du faux sang !"


Photos par Vasiliy Gloukhov - http://ikorum.ru/
Je prends le tube en aveugle et m'en passe un peu partout sur le cou et le visage, elle relève sa cape, nous saluons.
Le public applaudit et nous tombons dans les bras l'une de l'autre.
Nous rangeons sommairement et rapidement notre matériel, je vois du faux-sang un peu partout, sur les accessoires ou sur ses cordes.
D'autres personnes commencent à monter sur scène, nous sortons mais S. nous dit de remonter en scène pour la photo de groupe des performers de la soirée.
Tout se bouscule encore, je suis couverte de faux-sang, je n'ai plus de string, j'aimerais au moins m'essuyer. Dans le même temps, S. me donne un diplôme du RopeFest avec mon nom et je comprends pourquoi elle me l'avait fait écrire sur un papier le vendredi soir.

Nous sommes tous alignés, plusieurs flash crépitent, nous crions "shibari", Chloé ramasse mon string et me le rend, tout va trop vite.
Nous retournons enfin dans les loges en espérant nous changer et avoir un peu de temps pour se centrer l'une sur l'autre mais de nouveau, c'est la foule, des gens entrent et sortent de partout, j'aide Chloé à trouver ses chaussures parce qu'elle pleure de les avoir perdu.
Je suis toujours à moitié nue et couverte de faux-sang. Vlada entre et nous félicite en nous donnant une médaille en chocolat avec un visuel de Moscou en récompense. J'ai envie de la serrer dans mes bras mais je suis couverte de faux-sang. Je trouve son geste tellement doux et universel.
Les gens disent qu'ils ont apprécié et ont envie de partager leur ressenti avec nous, Mila parle des cordes qui coinçaient et on sent dans sa voix qu'elle en est encore tendue.
Tout le monde noue félicite avec de grand sourire, et à un moment, les choses se calment un peu, nous pouvons nous changer, nous essuyer, essayer de reprendre figure humain.
Il est désormais question de dîner mais Mila a une master-class demain et elle veut s'assurer que nous rentrerons tôt avec Chloé.
Nous retournons au restaurant georgien de la veille, en fumant (enfin) un cigarette devant, Mila commence à me faire part de ses craintes. Rien n'a fonctionné comme elle l'espérait, elle pense que le show était raté.

J'essaye de la rassurer en lui expliquant que le public ne connaissait pas le show et qu'il n'a pas vu les "ratés". Mais elle s'entête d'autant que je lui ai signalé des fourmillements dans le bras gauche et qu'elle est persuadée de m'avoir blessée.
Je rationalise en lui expliquant que nous sommes fatiguées, je répète et répète encore qu'elle a tout donné, que le public était content et que sa part du contrat est accomplie.
Mais le temps maussade et la fatigue la laissent dans un état de déception qui me broie le cœur.
Nous rentrons plutôt tôt ce soir-là comparé aux autres soirs et avec le luxe d'une voiture via les amis de Chloé.
Mila se prend un verre du cognac offert par la délicieuse Larissa et vient fumer avec moi et S.
Un dernier câlin et elle part se coucher dépitée.

Dimanche 9 novembre
Réveil matinal pour la master-class. Alors que la veille, il neigeait, aujourd'hui, il fait merveilleusement beau. Un temps presque printanier.
Le trajet en métro vers la salle se fait avec une Chloé boudeuse, arrivées à la salle, il y a comme un flottement, quelques couples sont en pratique libre.
Mila demande à S. ce qu'il en est de la master-class, S. ne sait pas et propose d'attendre Boris.
Karol est là, alors Mila lui propose de l'attacher en attendant. Je propose de leur faire des photos.
Mila prend toutes les informations nécessaires à propos de Karol et lui fait une belle suspension latérale sur la scène, pendant que Boris qui est revenu s'active.
Une fois, terminé avec Karol, Mila demande à Boris ce qu'il en est de la master-class et il lui répond mais tu viens de la faire avec Karol.
Je suis déçue, ce n'est pas ce que nous avions prévu, elle m'en parle depuis des mois de ce que nous allons faire à cette master-class...
Nous apprenons que le challenge de "bondage escape" est déplacé en début d'après-midi. C'est une idée de Vlada cet escape-challenge et elle a proposé à Mila d'attacher Falco.
Mila est sur un petit nuage.
Nous décidons d'en profiter pour aller manger, Boris nous conseille le snack juste à côté.
Au retour, l'escape challenge se met en place. Comme à Munich, 15 minutes pour attacher 15 minutes pour se détacher mais là c'est plusieurs binômes qui s'affrontent.
Il y a bien une dizaine de couples sur le tatami. Le défi commence, il y a une belle émulation.
Certains encordeurs ont terminés au bout de 3 ou 4 cordes, Mila reste la dernière à attacher Falco jusqu'au dernier moment avec tout le soin et la méticulosité qu'elle peut mettre dans un défi.
Le chronomètre s'inverse et c'est aux modèles de se détacher, le public est vraiment enthousiasme et les encourage. La première qui se libère reçoit un tonnerre d'applaudissement. Je crois que nous sommes tous aussi contents qu'elle, qu'elle se soit détachée.
Quelques autres modèles parviennent à se détacher, Falco arrive presque à bouger une de ses mains mais ça ne suffira pas à le libérer dans le temps imparti.
Mila est ravie d'avoir gagné, elle est prise dans un tourbillon de photos et de félicitations.
Je me sens en retrait, puis finalement je décide de m'écarter.
Les show commencent c'est le premier soir où nous avons l'occasion de les voir. Je les regarde en sortant consciencieusement fumer ma cigarette entre chaque.
A un moment, Vlada me dit que Mila me cherche. Elle vient me voir, je dis que ça va aller.
Larissa lui offre un sac de victuailles russes assorties d'un vin réputé excellent. Mila se trouve une partenaire pour ouvrir la bouteille, je m'écarte en regardant les show.
La fin des show arrive, c'est le moment des photos collectives de la soirée, puis du festival.
Mila est, de nouveau, accaparée de partout, certaines personnes me parlent mais à chaque fois, une autre personne les rabroue en disant que "je ne sais pas".
Je me mets à l'écart, Mila vient fumer avec moi, voit que ça va mal, me propose un jeu de cordes pour lequel je me sens incapable, insiste encore et propose de remonter.
Je lui dis finalement que oui. En retournant dans le club, on sent la fin de soirée, on essaye de savoir ce que Chloé veut faire mais sa Dom est là et il est difficile de savoir ce qu'elle veut.
Vlada propose un restaurant, nous y partons en procession avec tous ceux qui restaient encore dans la salle, ça cause et ça plaisante gentiment.
La nuit se poursuit dans le restaurant, à causer cordes surtout avec la table et poly-amour avec la Dominante de Chloé.
Je commence à être fatiguée et à parler de rentrer quand je découvre que Saint-Pétersbourg est un réseau d'îles reliées par des ponts dont certains s'ouvrent la nuit pour laisser passer les bateaux.
Il faut donc attendre que le pont se referme pour rétablir la circulation aux voitures...
La nouvelle me terrasse et malgré l'excellente compagnie, je songe à m'endormir sur la table.
Nous repartirons très tôt le lendemain avec un taxi.

Lundi 10 novembre
Journée d'anniversaire pour moi. Mila fait pleins de complots dont je ne sais rien, je ne sais pas à quelle sauce, je vais être mangée mais il fait toujours grand beau (en beaucoup plus froid que la veille).
Elle me souhaite mon anniversaire à son réveil et revient vers moi avec sa cape de scène en me la mettant autour des épaules.
"un premier cadeau, tu sors beaucoup plus que moi, ça ne me servira plus!"
Je ne sais pas quoi répondre, elle sait combien j'ai le culte de l'objet et de l'histoire qui va avec, cette cape m'attache définitivement à elle, elle me serrera les épaules chaque fois que je la porterais.
Et ça me fait chaud le coeur.
La journée s'étire tranquillement, elle m'a demandé de prendre ma tenue fetish de vendredi soir, j'ai tout préparé.
A un moment, Chloé vient dire que Larissa nous attend. Mais Mila n'a pas encore pris sa douche, elle dit que nous partirons après.
Nous prenons le métro pour rejoindre Larissa, cela nous permet de voir d'autres stations et même de faire un changement de ce gigantesque métro trop grand.
Arrivée à destination, nous attendons sous un auvent en fumant une cigarette quand deux militaires s'approchent de nous, je cherche déjà mon passport quand Chloé explique qu'il faut éteindre les cigarettes. Nous obtempérons pour finalement voir 4 policiers venir fumer devant nous, au même endroit...
Chloé s'anime et nous fait déplacer d'une centaine de mètres en parlant au téléphone en décrivant où nous sommes. D'un coup, un homme sort de la foule, nous salue et prend le sac de cordes de Mila.
Il nous emmène à une voiture où nous attend Larissa.
Viktor va nous faire visiter la ville en voiture en nous l'expliquant avec toute l'attention du monde. Nous voilà, parties pour une visite privée des monuments de Saint-Pétersbourg, nous en prenons plein les yeux. Viktor a toujours une petite anecdote ou un mot à dire sur les bâtiments ou sur les rues, il nous fait prendre une Avenue Marat très fièrement en précisant que c'est un français et je suis impressionnée.
A un moment, pour mieux nous montrer la forteresse, il passe devant un lanceur de missile et dit calmement "c'est quelque chose qui fait peur aux américains".

Je suis en pleine ville devant un lanceur de missile nucléaire et le gars il me dit ça comme il me demanderait l'heure. Nous sommes interloquées.
La visite se poursuit tranquillement, nous arrivons même à identifier les bâtiments en repassant devant.

Puis il se gare et nous dépose dans une rue très cosy entre les enseignes "Vuitton" et "Dior"...
Je les suis sans vraiment comprendre et nous nous embouchons dans un petit escalier qui mène dans un drôle de bar-restaurant à la déco industriel/fetish un peu dingue, emplit de vieux instruments électroniques des années 50, avec même une voiture dans le bar pour faire déco.
Ils avancent vers le fond de l'établissement et je vois une table avec Chloé, sa Dom et son autre soumis, Larissa et Viktor, Vlada et Falco. Tout le monde avec de grand sourire.
A peine installée, tout le monde y va de son petit cadeau, j'ai la tête qui tourne un peu, tellement je croule sous les attentions, même Viktor m'offre un bouquet de roses.
Le repas se passe tranquillement à parler de choses et d'autres avec la fatigue du week-end cumulée.
En fin de repas, on m'amène une part de cheese-cake avec une bougie dessus.
Je veux la souffler mais l'on me dit de faire un vœu. Je demande à ce qu'ils me chantent "happy birthday" en russe mais ils n'ont pas d'adaptation, alors Larissa et Viktor me chante une belle chanson russe qu'ils chantent pour ces occasions.
Les flash crépitent, je souffle ma bougie en souhaitant les revoir tous.
En fin de repas, une grande concertation se tient sur où et comment me faire une suspension dans Saint-Pétersbourg, ce soir. "Bondage Terrorism".
Nous décidons que cela sera dans le restaurant, Larissa négocie avec le patron et obtient l'autorisation.
Photo par Ludmila Metresa/Ropes
http://ludmila.kabook.fr/ - http://ludmilametresa.deviantart.com/
Mila installe le point de suspension et répartit les rôles de chacun pendant que je vais me changer.
Quand je reviens tout est quasiment près, elle me fait asseoir et commence les passages de cordes.
Puis demande à Viktor et Sergey de me porter, elle termine de me solidariser au poteau, tout le monde lâche et recule. Les flash crépitent, de nouveau, je suis étourdie par la vitesse à laquelle tout a lieu.
Photo par Ludmila Metresa/Ropes
http://ludmila.kabook.fr/ - http://ludmilametresa.deviantart.com/
Elle me demande régulièrement où j'en suis. A un moment, je lui dis que j'aimerais que ça se termine, Falco l'envoie poser près de moi, et déjà Falco et Sergey me pose au sol.

La soirée se termine sans s'éterniser, nous sommes tous fatigués des jours précédents, nous avons des valises et un long voyage à faire le lendemain.
Mardi 11 novembre
Boris est malade et ne peut pas nous emmener à l'aéroport mais c'est Chloé qui commande et paye notre taxi. Un charmant monsieur qui ne roule pas comme un fou et nous dépose au terminal avec un sourire.
Nous décidons de fumer une cigarette avant d'entrer dans l'univers de l'aviation où le fumeur est si mal accueilli.
Un taxi s'arrête, une jeune femme en descend, marque un temps d'arrêt, nous regarde et nous demande si nous étions au RopeFest, étonnement mutuel, nous répondons par l'affirmative.
Et la voilà qui s'anime : "j'ai vu votre show ! il était incroyable !"

Bon, la journée commence bien. Et elle continuera sur cet incroyable présage.
Et comme un dernier pied-de-nez à toutes ces choses invraisemblables qui se passent en Russie, nous mangerons du Mac Donald dans l'aéroport de Saint-Pétersbourg.
Les douaniers seront aimables et amusés par mon bouquet de roses, le confort et la prévenance de Swiss Air nous fera un bien phénoménale au moral,

l'arrivée à Zurich avec de spacieux fumoirs sera une délivrance, le trajet jusqu'à Paris, un saut de puce, nos bagages seront dans les 10 premiers délivrés et nous arriverons à retrouver Fab avant la fin de son temps de dépose.

Pour repartir aussitôt vers chez nous en évitant les douaniers avec classe.
Elle filera dans la nuit avec la capote ouverte, deux red bulls, quelques M&M's et des warning.
Mon tourbillon est reparti et je volerais les mots de Vlada :
"Merci d'être si continuellement pleine de vie !"

Tu es un tourbillon de folie qui est entrée dans ma vie, je suis heureuse de ces moments partagés qui resteront gravé en moi.
J'avais dit que je te suivrais où tu voudrais mais je ne pensais pas que tu m'emmènerais si loin au propre comme au figuré.

Mots-clé du séjour :
Instangram, Russian Tank, Black/Dog/Coffee for Master and white/cat/tea for sub.

Crédits : Cordes : Ludmila Metresa/Ropes
http://ludmila.kabook.fr/ - http://ludmilametresa.deviantart.com/

vendredi 10 octobre 2014

Saint-Avit #2, RopeFest

Mon co-voitureur m'est connu et m'a laissé un bon souvenir, il fera le trajet aller et retour avec moi. C'est agréable et reposant tout en permettant de pousser plus loin les conversations.

J'arrive le vendredi soir avec ma pipe, comme elle le souhaitait et elle s'empresse de faire une photo de nous deux avec nos pipes.
Elle me donne mon costume pour Saint-Pétersbourg, c'est la première fois qu'une femme m'offre de la lingerie, c'est étrange et touchant.
Nous parlons un peu de tout de rien, de la Russie, du show, de la vie et allons nous coucher.
Samedi, nous prenons le temps de traîner, c'est le week-end. Nous arrivons assez tardivement à Saint-Avit pour y déjeuner tardivement.
Plutôt fière de nos dernières photos, je lui ai lancé le défi de refaire de belles photos ce week-end avec un "chiche !" sur FB, qu'elle n'a pas pu s'empêcher de relever. Pier nous a prévu un beau lieu et nous y amène.

C'est une petite crypte ancienne sous une église mais avec un accès à part. Il y fait sombre et humide et nous n'avons aucune idée des conséquences que cette humidité aura par la suite.
Elle s'installe, étudie la configuration des lieux, prend ses marques et finalise le projet.
Nous installons les cordes pour les points de suspension, quelques bougies pour donner une autre ambiance au lieu, je me change, elle fait ses pré-réglages de photos.

Tout est prêt, action.
Elle place les premières cordes sur moi, elle veut faire quelque chose d'assez élaboré. Je sens une gêne sur le pubis mais comme il s'agit d'une suspension, je pense que le nœud sera décollé et je n'en parle pas.
Ensuite, je me place sur un banc pour être surélevée et elle commence à mettre en place les cordes pour la suspension (une sur chacun des quatre piliers).
La corde me gêne toujours mais je reste convaincue que le nœud sera tiré en arrière par la suspension. J'essaye de le déplacer quand il est trop gênant mais rien y fait.
Finalement, quand elle tire pour mettre la dernière corde en place, le nœud glisse sur le pubis et se place encore plus mal, je couine.
Elle vient de suite, voir où se situe le problème, je lui indique le nœud, comme moi, elle a le réflexe de le déplacer, je chouine encore plus et prend une respiration haletante pour faire passer la douleur.
C'est la dernière corde, arrêter si proche du but, c'est rageant.
Elle me demande si j'ai d'autres inconforts, je n'en identifie pas d'autres, elle demande si elle coupe la corde pour continuer, je souffle un "oui" coupable. Elle coupe la corde, instantanément la douleur s'évapore, les autres cordes me semblent inexistantes face à celle qui me faisait tant souffrir.
Elle termine de m'installer, place une bougie et un couteau dans mes mains après les avoir liées, me bande les yeux.
Régulièrement, elle me demande si ça va, l'infini soulagement que je ressens me permettrait de rester ainsi pendant des heures.
Elle commence ses photos en pause longue.
Pier est partout pour me soutenir, pour aider à mettre les points de suspension en place, pour allumer les bougies autant que pour nous faire des photos du backstage.
Cordes&photo : Ludmila Metresa/Ropes
Cordes&photo : Ludmila Metresa/Ropes

Nous sommes plutôt fiers de nous et commençons à ranger quand plusieurs personnes passent dans la crypte. Mais il n'y a plus rien à voir, outre quelques cordes.
Et c'est la personne venant fermer la crypte qui nous poussera gentiment dehors en nous laissant largement le temps de finir de ranger.
Nous en resterons là de nos exploits de cordes et rentrons chez Pier où une raclette nous attend.

Dimanche, réveil calme et une dernière répétition, certainement la dernière.
Je n'arrive pas vraiment à croire que c'est la dernière alors je ne la vis pas ainsi.
Dès le début, elle rencontre des soucis avec les cordes qui se glissent pas comme d'habitude et qui vont l'ennuyer tout le long du jeu de cordes. Nous comprendrons alors les conséquences de notre escapade dans une crypte sombre et trop humide.
Mais malgré ces impondérables, elle effectuera l'enchaînement sans autre souci particulier et dans le temps imparti.
Encore une parenthèse qui se ferme sans en avoir vraiment conscience, l'aventure vers Saint-Pétersbourg est au bout des doigts.
Le temps nous rattrape, il n'y aura pas d'autre entraînement.

Crédits : Cordes&Photo par Ludmila Metresa/Ropes 

lundi 6 octobre 2014

Des modèles qui ne font rien.

Elle me trottait dans la tête cette note sur les "modèles" qui "ne font rien".
Parce que c'est trop souvent le discours que l'on entend, que tout le mérite est attribué par défaut au manieur de cordes puisque c'est lui qui "travaille" dans une notion visible du terme.

Et je la trouve injuste, insultante autant qu'ignorante cette remarque persiflante.
Parce que non, le modèle ne fait pas "rien".
Le modèle partage une partie de son intimité, le modèle accepte de lâcher-prise, le modèle fait confiance, le modèle gère la douleur ou l'inconfort, le modèle essaye de faciliter les passages de cordes quand c'est possible, le modèle participe de toute son âme et à la mesure de ses moyens.
Le modèle autant que la soumise BDSM est pro-actif qu'importe que l'illusion d'un regard méconnaissant ne sache le lire.

Personne ne devrait se permettre ce genre de phrase péremptoire comme un jugement de qualité envers tel ou tel autre rôle, en en plaçant l'un au-dessus de l'autre quand les deux sont nécessaires pour exister. Quand ce qui existe dans les cordes ne procède que d'un échange. Et que l'échange n'existe qu'à plusieurs.

Parfois le modèle est d'un niveau exceptionnel et permet des poses qui ne sont pas possibles avec d'autres modèles, mettant en valeur le travail de l'encordeur par sa souplesse et sa résistance.
Parfois, l'attacheur est d'un excellent niveau et permet de sublimer des corps qui n'appartiennent pas aux standards habituels, mettant en valeur ces corps par leur art à manier les cordes.
Mais qu'importe le mérite de l'un ou les aptitudes de l'autre, tout ceci n'existerait pas l'un sans l'autre, sans ce partage de ressources communes, sans l'échange qui connecte et crée l'émotion.

Parce que les cordes parlent de rencontres humaines, elles n'ont pas à subir d'échelle de valeur.

vendredi 26 septembre 2014

Projet "Le Supplice de l'Ange"

C'est un projet qui est né d'un ami précieux, ils se sont arrangés entre eux et voilà qu'une date se rajoute à nos entraînements. Cette fois, je trouve un co-voiturage matinal et j'arrive en fin de matinée à Limoges et nous voilà reparties dans la Creuse pour un entraînement presque "volé"'.
Sur la route, elle ne fume pas. Elle s'est mise à la pipe, fait des tas de blagues dessus et s'amuse que j'en ai une aussi, elle la réclame pour faire des photos ensemble. Sauf que la pipe, quand on la fume, on peut faire que ça... pas de pipe en conduisant, pas de pipe en pianotant...

Nous arrivons pour un déjeuner tardif, une pause au soleil entre sieste et apprentissage des cordes pour Pier et notre entraînement "bonus" peut se mettre en place.
Tout se passe sans souci notable, elle a encore modifié quelques éléments comme toujours, parce qu'elle veut toujours faire mieux.
Nous restons dîner en compagnie de nos hôtes et repartons sur Limoges où Ardonau nous attend pour prendre un verre en discutant du projet.
Je suis spectateur de leur dialogue, elle me défend bec-et-ongle, imposant temps de repos et modérant le nombre de poses à réaliser. Je trouve ça émouvant comme elle prend soin de moi avec un ton de parole qui ne se négocie pas. Parfois, on me demande mon avis, j’acquiesce, parce que moi : "je fais ce que vous voulez, les gars ! je suis venue pour ça".
Ils finissent par être d'accord, Mila fait des schémas des poses négociées, je dis oui, pas de problèmes avec un doux sourire. Je sais que je ne peux pas être mieux entourée.
Il ne peut pas s'empêcher de nous tirer le portrait en cette fin de nuit d'une bien longue journée.
Photo : Ardonau ( http://ardonau-chiaroscuro.blogspot.fr/ )
Le samedi, rendez-vous pour les photos avec Ardonau sur le parvis de la cathédrale. Il fait beau.
Il nous rejoint et nous contournons la cathédrale pour arriver sur une de ces minuscules et toutes tordues places que le moyen-âge a légué à nos plans d'urbanisme moderne.
Là, plusieurs maisons à colombages dont une en travaux manifestes, c'est là que nous allons, nous entrons et enfilons 3 escaliers pour arriver sous le toit, devant les magnifiques poutres qui tiennent la maison. Voici le lieu du crime avec la propriétaire qui nous aide à nous faire une place.
Tout le monde prend ses marques,  Ardonau regarde le soleil et l'orientation de la lumière, Mila inspecte les poutres et le périmètre alentour, je me cherche un endroit où me changer.
Quelques lourdes bricoles sont déplacées pour nous faire de la place, je me change, Mila place le point de suspension.
J'essaye d'oublier les échafaudages et le vide. Je veux donner le meilleur de moi-même, je suis tellement heureuse qu'il ait eu envie de ce projet. Un peu comme elle me veut dans ses cordes, il me veut pour ses photos et j'ai fait des choix où je suis rarement une personne que l'on souhaite.
Tout est en place, les choses sont clairement formulées pour tous, elle me demande d'aller sous l'anneau de suspension.

Elle commence la mise en place d'un harnais de buste que je garderais tout au long de l'après-midi. Une autre façon d'approcher les cordes que je n'avais pas touchée jusque là et dont je les remercie de me donner l'occasion de la découvrir.
Elle termine avec un harnais de bassin. Et voilà, la première pose qui s'installe, la suspension se met en place, elle termine de lier mes mains, le tabouret qui nous aide disparaît du cadre.
J'entends des bruits de mouvements et de déclenchement, des chuchotements aussi.
Il dit qu'il a terminé, elle ramène tout le monde à ma hauteur et me revoilà au sol.


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Une petite pause parce que je ne vois pas le temps passer, parce l'air du temps est doux et qu'il faut prendre le temps.
N. nous amène des boissons et la conversation dérive sur l'échafaudage le long de leur maison. Mila laisse entendre qu'elle a toujours rêvé de faire une suspension de ce genre. Elle insiste pour que Ardonau prenne cette photo-là aussi dans sa série. On parle des poses à faire, du temps qu'il reste et de la luminosité. Il faut s'y remettre sans mollir.
Elle me lie les mains de façon différente en amont de la suspension. Cette suspension dure assez longtemps mais est relativement confortable. Elle finit par me fixer les pieds pour que je cesse de tournoyer et elle me délie les mains pendant la suspension pour le besoin des photos.
C'est étrange, cette sensation de suspension verticale et non-inversé, pour le coup, on a une vraie sensation de lévitation. Comme c'est étrange de se délier les mains tout en gardant la pose.

On me redescend et voilà le plus gros du morceau, la suspension en inversé. C'est très étrange d'avoir les mains libres, cela donne envie de s'accrocher quand il n'y a rien à quoi s'accrocher. Je crois que je préfère encore avec les mains liées sans aucun choix que de me laisser aller. Et finalement, j'en reviens toujours au fait que mon induction passe par les bras.
C'est une position compliquée à tenir pour moi, les minutes s'éternisent, je focalise sur ma respiration lente et profonde, j'entends les déplacements dans l'air, les déclencheurs. Elle prend régulièrement, mon avis "ça va ?", à un moment, je lui signale que j'aimerais qu'on songe à arrêter la chose.
Un flottement et me voilà, soutenue, le soulagement est instantané et agit presque comme un "turn on".
Je reprends mes esprits pendant que ça s'agite autour de moi, il est toujours question d'échafaudage et la lumière s'enfuit avec la journée.
Pendant que je me recompose tout s'organise, le point de suspension est mis en place après aval de P. (échafaudeur professionnel de son état), il est d'ailleurs réquisitionné pour aider à mon installation.
J'ai l'impression de vivre un cauchemar (je suis sujette au vertige), je repense aux conseils d'un ami psy* avec qui je devise sur le sujet de mon vertige depuis qu'elle m'a parlé de son projet de suspension à un pont.
Je visualise l'échafaudage, le vide dessous, moi dessus, je focalise sur l'instant T, j'en oublie le monde, l'univers.
Elle place d'autres cordes sur moi, elle préfère une suspension latérale et repasse par un TK. J'aime le TK, il me rassure et m'évite d'avoir envie de m'accrocher à n'importe quoi avec mes bras.
Harnais de buste et harnais de bassin sont en place, les points de suspension aussi, P. et Ardonau sortent sur l'échafaudage, elle aussi, c'est à moi.
Avec mes bras prisonnier du TK c'est une opération périlleuse, tout le monde me guide et me soutient. Je ne jette pas un seul regard en bas, mon esprit se fixe sur le haut de l'échafaudage et les personnes qui m'entourent.
Les hommes me basculent, me portent et elle commence à m'attacher à la suspension. Tout tremble doucement à chaque mouvement c'est stressant et j'essaye de faire abstraction. N. doit sentir mon malaise et dit que je dois regarder le plancher du 3° étage que je verrais le sol que ça me rassurera. L'idée m'apparaît lumineuse, je fixe le plancher comme si je voulais fusionner en lui.
Elle s'active autour de nous, d'un seul coup, un bruit sourd, le temps qui se suspend. Je reconnais cette sensation, c'est comme à Munich quand elle est tombée de scène...
Sauf que là c'est un échafaudage de 3 étages... Tout le monde en est quitte pour une belle peur, elle a été retenue par une balustrade dont c'est le but.

Elle lance le signal de reculer, Ardonau dégaine son appareil, prend les clichés et ils sont déjà en train de me soutenir pour me redescendre, rentrer par la fenêtre sans regarder en bas et sans mes bras toujours liés.
Sentir un sol sur et ferme sous mes pieds : respirer.
Nous sommes contents de notre exploit, les tensions tombent et les langues se délient. Je comprends qu'il y avait des personnes en bas qui ont pris des photos de la suspension, je regrette de ne pas voir ces photos-là.
On continue à ranger en causant tranquillement, Ardonau me donne une couette en disant que Mila avait demandé une couverture pour moi, il insiste pour que je parte avec. Je trouve cela tellement incongru autant qu'attentionné.
N. et P. nous paye une boisson, Ardonau dit qu'il va vite travailler les photos, nous sommes tous un peu impatients.

Nous rentrons chez elle et Ardonau nous tient en haleine une partie de la soirée en distillant les photos à mesure qu'il les fait. Finalement, alors que nous voulions nous coucher tôt, nous nous couchons super tard mais en ayant vu les photos de la journée.

Le dimanche s'étire tranquillement, j'ai un co-voiturage vers midi, elle attend un invité qui arrive au moment où nous partons rejoindre mon co-voitureur.
Je monte dans la voiture d'un grand gaillard à l'allure peu avenante, pendant qu'elle repart vers de nouvelles aventures.
Finalement, mon co-voitureur s'animera en m'expliquant le projet de fou sur lequel il travaille depuis 4 ans : il se construit son propre bateau dans lequel il habitera.
Le voyage se fait rapidement à l'écouter me narrer ses aventures de bricoleur dingue.

Un week-end en parenthèse sur la route de Saint-Pétersbourg.

Crédits : Cordes par Ludmila Metresa/Ropes - Photos par Ardonau ( http://ardonau-chiaroscuro.blogspot.fr/ ).
Série compléte avec vision du projet par l'artiste : http://ardonau-chiaroscuro.blogspot.fr/2014/09/le-supplice-de-lange.html